Monsieur le Président de France Nature Environnement,
Mesdames et Messieurs, les présidents des associations fédérées à France Nature Environnement
Permettez-moi d’abord de vous remercier de votre invitation, et de l’initiative que vous prenez aujourd’hui pour remettre l’enjeu environnemental dans le débat de cette campagne présidentielle.
J’ai bien entendu conscience de la difficulté qu’il y a à venir en tant que candidate écologiste plancher devant vous tous, qui au quotidien depuis des années ont fait de la préservation de notre avenir le coeur de votre engagement.
A vous toutes et tous, qui, toutes ces années, ont d’abord donné l’alerte pour très vite devenir force de proposition et acteurs du changement, je veux dire ici ma profonde gratitude. Vous avez été, dans des conditions souvent difficiles, des héros ordinaires. Pendant des années, j’ai eu l’occasion de rencontrer ceux qui ont mené le difficile combat contre la criminalité financière. Auprès de nombreux militants écologistes, j’ai compris combien mes combats d’hier rejoignaient ceux de ces militants du quotidien.
Je pense à tous les militants que j’ai découverts sur le terrain dans leur engagement pour la protection de la nature :
pour la préservation des zones humides, du Grand Hamster d’Alsace et notre ressource en eau
contre les gaz de schiste, les algues vertes, les grands projets aéroportuaires comme l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ou celui de Mayotte.
A la présidence de la Commission du Développement au Parlement Européen, j’ai pu mesurer comment les mêmes logiques menaient aux mêmes impasses. Lorsque les ressources naturelles sont pillées au nom de la seule loi du profit et de la rentabilité immédiate, ce sont les équilibres planétaires et humains qui sont menacés.
Le combat que je mène depuis plusieurs années contre les paradis fiscaux protège aussi l’environnement, lorsqu’il s’agit d’empêcher la spéculation sur les marchés des matières premières, en particulier agricoles.
C’est au nom de la protection du bien commun que je suis engagée avec les écologistes. Et j’ai la conviction que c’est la protection des biens communs que nous devons propulser au niveau mondial, européen et en France.
C’est cette parole que la France devra porter au 4ème Sommet de la Terre, en Juin prochain, à Rio. Les premières négociations se sont déroulées cette semaine à New York dans une totale indifférence française. La parole de la France devra pourtant être forte.
Nous devons créer enfin une Organisation Mondiale de l’Environnement et renforcer le poids de la société civile au niveau mondial.
En définissant ensemble une économie verte qui nous permette de revisiter l’idée même du développement et de définir les nouveaux indicateurs de richesse, de bien-être, y incluant notamment la biodiversité.
Nous vivons une crise sans précédent. Je pense que face à l’impasse du modèle économique dans lequel nous nous trouvons, pour des millions de Français l’environnement peut devenir la solution.
La crise n’est pas que financière. C’est aussi une crise sociale et écologique à laquelle nous devons mettre fin. Nous sommes aujourd’hui en « déficit » écologique et les inégalités se creusent. Ignorer cette réalité-là, c’est promettre aux Français des lendemains plus difficiles encore.
Tel est mon engagement depuis maintenant plus de vingt ans, aller au-delà des constats établis et reconnus de tous pour répondre à une simple question : est-ce dans ce monde-là que nous voulons vivre et que nous voulons laisser en piètre héritage à nos enfants et nos petits enfants ?
Au risque d’en surprendre certains, je ne viens pas vous parler de nucléaire aujourd’hui. Non pas que le débat sur la transition énergétique ne soit pas central. Mais parce que je crois savoir que vous connaissez d’ores et déjà ma position sur ce sujet.
C’est peut-être aux autres candidats qu’il appartiendra de vous expliquer le choix moral qu’ils font alors que plus personne ne peut nier après l’accident de Fukushima que nous sommes soumis au risque nucléaire.
Et si certains ont saisi cet impératif, alors, disons-le sans détours, il ne suffira pas de fermer Fessenheim dans la mandature, immédiatement ou pas, pour faire prendre un nouveau cap à la France. De la même manière gardons en mémoire les traces qu’ont laissées dans la chair des hommes et celle des arbres, les essais nucléaires français en Polynésie et au Sahara. Ils ont souillé pour des milliers d’années la terre et la mer. N’oublions jamais les conséquences de nos actes et ne nous détournons pas de notre responsabilité pour le futur.
Je suis candidate écologiste à la présidence de la République et, à l’heure qu’il est, je mesure la responsabilité qui est la mienne. Je ne dois pas seulement proposer de changer de président, mais bien de changer de perspective.
Le long terme, voilà ce que devrait être notre horizon.
Ce qui s’est passé il y a dix, vingt ou trente années, et dont les traces persistent dans le présent.
Ce qui pourrait se passer demain si nous ne changeons rien, et qui fabrique notre futur.
Notre devoir d’écologiste c’est de concilier les impératifs du présent avec les nécessités du futur.
Le dialogue environnemental, voilà ce qui sera notre méthode.
Disons-le, sans aucun sectarisme, l’exercice du Grenelle de l’Environnement a fait du bien à la démocratie.
Jamais l’urgence écologique n’a été autant au cœur du débat public en France.
Et il y a bien des propositions faites lors de ces journées, qu’il faudra mettre en œuvre lors des premiers pas de la mandature.
Mais l’écologie ce n’est pas l’affaire d’un jour ou d’une grande déclaration dans les salons de l’Élysée.
L’écologie, ça n’est pas une affaire d’opportunité politicienne, mais c’est le sens et le cap que l’on donnera aux vingt prochaines années.
Alors si certains considèrent que « l’environnement ca commence à bien faire », j’aimerais leur dire sans agressivité aucune et avec certitude : « Vous n’avez rien vu, cela ne fait que commencer ».
Car il y a là un vrai risque à vouloir opposer l’intérêt de la planète à celui de ses habitants.
A vouloir, au nom d’un cynique calcul, faire de la protection des espèces une réglementation tatillonne et du braconnage électoral un petit bonheur.
Alors à tous ceux qui persistent à opposer les Français entre eux, je leur dis :
Il n’y aura pas les gagnants et les perdants de la transition écologique, mais un chemin tracé au nom de l’intérêt général et où chacune et chacun pourra trouver sa place.
Bien sûr nous aurons des adversaires et il sont d’ores et déjà nombreux : les représentants des intérêts particuliers. Je les ai vus au Parlement Européen, lorsque le lobby de l’agroalimentaire n’a pas hésité à investir près d’un milliard d’euros pour s’opposer au projet de règlement sur l’étiquetage des produits alimentaires.
Nous devrons bien sûr encadrer et réglementer la présence de ces lobbiess, mais nous sommes encore trop souvent démunis face à leur puissance.
Alors n’attendons pas que l’avenir leur ait donné tort, et faisons en sorte dès aujourd’hui d’avoir raison avant eux.
Je veux mettre le contre-pouvoir au cœur du pouvoir, que dès demain tous les lanceurs d’alertes, les défenseurs des territoires aient la capacité à peser sur les décisions.
Le Grenelle de l’environnement a introduit l’idée d’une gouvernance à cinq. Contrairement à ce qui s’est passé par la suite, il est temps de passer de la co-élaboration à la co-décision, et même à la co-gestion. Le dialogue environnemental est ma priorité.
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La réconciliation de l’homme avec son environnement doit être au cœur de nos solutions aujourd’hui en France comme en Europe.
Alors ne repoussons plus l’échéance et faisons en sorte qu’au mois de juin prochain la première loi votée par le Parlement nouvellement élu soit une grande loi d’urgence écologique, qui fasse de nos engagements du Grenelle et des nécessités d’aujourd’hui les priorités du pays dès demain.
Je propose de porter le principe de la seule règle d’or qui ait un véritable sens, celle qui va dans le sens de l’intérêt général de l’humanité, une règle d’or environnementale.
Les diverses stratégies de lutte contre la perte de la biodiversité et le dérèglement climatique ont globalement échoué. Je pense que c’est le résultat d’abord d’un manque de courage politique.
Je propose que, dès 2012, la France fasse le choix d’imposer la bioconditionnalité de tous les financements et aides publics. Nous les réorienterons vers une gestion durable et économe des ressources.
Je voudrais qu’en matière environnementale nous envisagions un nouveau grand principe, celui de non-régression, afin que les lobbiess deviennent impuissants à modifier les acquis environnementaux, afin que plus aucun gouvernement n’ait le pouvoir de nous ramener au passé.
Certaines mesures s’imposent et ne devraient plus faire débat dans la démocratie française : soutenir rapidement un objectif de réduction des émissions de CO2 à 30% et adopter sans délais un moratoire sur les OGM et l’interdiction de l’exploitation des gaz de schistes. C’est le bon sens même qui nous l’impose.
C’est aussi pour cela que je propose un plan de sortie des pesticides en une génération, et leur réduction de 50% dans la mandature ;
C’est aussi pour cela que je soutiens que les trames vertes et bleues deviennent opposables. Le respect du vivant et des paysages est plus précieux que la construction d’une route, d’un parking ou d’une zone commerciale. Je modifierai le code civil et le code pénal pour protéger des mauvais traitements les animaux domestiques et les animaux sauvages.
Nous établirons une véritable fiscalité écologique, qui comprendra une Contribution Climat Energie sur le territoire français, protégée de toute logique financière.
La France portera au niveau européen l’exigence d’exemplarité environnementale.
Nous devons lancer le chantier de la maîtrise des sols, réorienter la politique foncière, et la France devra lever son opposition à la directive-cadre européenne sur les sols.
La révision de la Politique Agricole Commune ne devra plus opposer emploi et environnement grâce une redistribution plus équitable des aides. La réorientation de cette politique favorisera les pratiques agroécologiques, l’accompagnement de la conversion vers l’agriculture biologique. Elle sera un levier d’une nouvelle coopération avec le Sud qui garantira la souveraineté alimentaire et favorisera l’agriculture vivrière.
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Il nous faudra changer de cap et avoir le courage de prendre la voie de la transition écologique.
Je veux inscrire cette transition au cœur de nos territoires.
Développer une économie de la proximité, des circuits-courts, permettant à chacun de vivre et de travailler près de chez lui est impératif. La relocalisation n’est pas un slogan, c’est une exigence sociale, politique et économique. L’avenir est à transformer nos moyens de consommation, de production et de transport.
Je veux inscrire cette transition au cœur de nos emplois.
Le changement de modèle peut nous permettre de créer un million d’emplois d’ici à 2020. L’objectif est certes ambitieux, mais il est crédible si nous sommes volontaires. A commencer par exemple par la rénovation thermique des logements qui peut créer près de 440 000 emplois dans le secteur du bâtiment. Nous donnerons toute leur place aux formations dont nous manquons cruellement, dans tous les métiers de la transition écologique : créer les parcours de formation et les filière, les doter de la reconnaissance nécessaire. Enfin, reconnaissons le vivier qui se trouve dans les milliers d’associations qui s’occupent de l’intérêt général. La protection de la biodiversité, l’éducation à l’environnement, l’expertise environnementale, le recueil des données naturalistes, l’application du droit de l’environnement sont autant d’activités créatrices d’emplois.
Je veux inscrire cette transition au cœur de la vie quotidienne.
Je veux garantir le droit à une alimentation saine et de qualité. Commençons par faire de la restauration collective un grand chantier pour la qualité de l’alimentation, avec un objectif simple et clair : 100% de bio pour nos enfants dans les crèches et les maternelles.
Cela participe à redonner à chacun l’accès à une santé de qualité. Ce sont nos modes vies qui pour une grande part déterminent les maladies de notre siècle. Il est temps d’y remédier !
Le constat que dresse votre « Contrat environnemental » est lucide. Les propositions qu’il porte ne le sont pas moins.
Vous proposez un chemin. Pas simplement « ce qu’il faudrait faire », mais « comment on peut, concrètement, le faire ».
Je ne doute pas que, parmi celles et ceux qui se succèderont avec moi cet après-midi à cette tribune, tous et toutes vous diront combien ils partagent les principes généraux du « Contrat environnemental ».
Je veux toutefois vous faire une confidence, tirée de ce que j’ai compris, maintenant, d’une certaine façon de faire de la politique, et d’une certaine façon dont beaucoup parlent d’écologie.
Ils en parlent beaucoup, et ils en font peu. Mais n’en doutez pas, ils auront les yeux rivés sur les résultats électoraux des écologistes au soir du 22 avril.
Ni naïfs, ni rêveurs, soyons simplement responsables et décidés à aller au delà des discours pour passer aux actes.
Oui, je veux une politique de vérité – et les guignols de l’info pourront continuer de s’en amuser – parce que les Français et Françaises ont le droit à la vérité et parce que la politique a besoin de transparence.
Je sais qu’il y a urgence. Non pas par catastrophisme et non pas par envie d’attiser les peurs, mais avec la lucidité de celle qui a les yeux ouverts. Je veux pouvoir dire que c’est de notre avenir qu’il s’agit et de celui de nos enfants et de nos petits-enfants et qu’il est peut-être beau.
Je suis candidate à l’élection présidentielle car je veux réussir le rendez-vous entre les Français et l’écologie.
Je veux les convaincre qu’il n’est plus temps d’attendre. Nous ne devons pas reporter encore à la prochaine élection les décisions fondamentales que nous devons tous prendre ensemble, maintenant.
Je sais que je ne suis pas seule face à cette tâche. Aujourd’hui les écologistes doivent être rassemblés.
J’ai besoin de votre confiance.
Car pour l’écologie c’est vraiment l’heure.
Je vous remercie.